novembre 9, 2024
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BookbanUSA : les États-Unis vont-ils interdire Twilight, Hunger Games et d’autres livres emblématiques ?

Avec la réélection de Donald Trump et les recommandations du Projet 2025, les craintes autour de la censure de livres emblématiques aux États-Unis s’intensifient. Les ouvrages abordant des thèmes sensibles, tels que Twilight ou Hunger Games, pourraient-ils être menacés de bannissement ?
bookbanusa explication

Depuis la réélection de Donald Trump en tant que 47ᵉ président des États-Unis, les craintes d’une intensification de la censure littéraire, particulièrement contre les œuvres de fiction destinées aux adolescents et jeunes adultes, ont pris une ampleur inédite. De nombreux créateurs de contenu s’inquiètent de voir des titres populaires tels que Twilight, Hunger Games, ou encore La Servante écarlate être bannis des bibliothèques et des écoles américaines. Entre rumeurs, désinformation et véritables inquiétudes, retour ici sur le phénomène que certains nomment déjà “bookbanUSA”. 

Bookban USA : une intensification des tentatives de censure littéraire aux États-Unis depuis 2020

Les tentatives de censure aux États-Unis n’est pas un phénomène nouveau, mais elle a pris une ampleur particulière depuis ces dernières années. Selon le dernier rapport de l’association PEN America, qui milite pour la liberté d’expression, 10 046 tentatives de censure ont été recensées durant l’année scolaire 2023-2024, contre 3 362 seulement l’année précédente. Ce nombre record met en lumière une réalité préoccupante pour les bibliothèques publiques et scolaires, qui font face à des demandes croissantes de retraits d’ouvrages jugés « inappropriés » par des parents d’élèves ou des associations conservatrices.

Où les livres sont le plus bannis aux USA ?

Ces censures sont particulièrement concentrées dans certains États américains, notamment la Floride et l’Iowa, où des initiatives locales ont banni des bibliothèques des livres abordant des thèmes jugés “sensibles”. Les livres ciblés par ces actions explorent souvent des sujets comme la sexualité, le racisme, les violences sexuelles, les inégalités sociales, ainsi que la représentation de personnages LGBTQIA+ ou issus de minorités racisées. Cette vague de censure est principalement soutenue par des groupes conservateurs, des parents d’élèves et certains élus républicains, invoquant la nécessité de « protéger les enfants » contre des contenus qu’ils considèrent comme inadaptés ou dangereux.

En février 2024, Valentina Gomez, candidate républicaine au poste de secrétaire d’État dans le Missouri, s’était filmée en train de brûler des livres qu’elle jugeait trop « progressistes », suscitant l’indignation des défenseurs de la liberté d’expression. Cet acte choquant illustre une réalité à laquelle font face de nombreux bibliothécaires et enseignants, qui sont parfois publiquement dénoncés pour leur choix de livres. L’élection récente du républicain Donald Trump ne fait qu’accentuer la crainte d’une censure généralisée.

Les intentions ambiguës de Donald Trump sur la censure des livres : entre politique éducative et idéologie conservatrice

La réélection de Donald Trump soulève de nombreuses questions sur l’avenir de la liberté d’expression aux États-Unis, et plus spécifiquement dans le domaine de l’éducation et de la littérature. Bien qu’aucune interdiction officielle de titres populaires comme Twilight, Hunger Games, ou La Servante écarlate ne soit à l’ordre du jour (du moins d’un point de vue national), certaines déclarations de l’administration Trump et des éléments de son programme laissent entrevoir une orientation idéologique préoccupante.

Le programme du président élu met en avant une politique éducative centrée sur « les connaissances et les compétences, pas la théorie critique de la race et la théorie du genre ». En d’autres termes, Trump et son administration entendent lutter contre ce qu’ils qualifient de « propagande gauchiste » en coupant les financements des écoles qui, selon eux, « endoctrinent » les élèves avec des contenus progressistes. Cette position ne précise pas explicitement quelles œuvres seraient concernées, mais elle crée une atmosphère de méfiance pour tout contenu perçu comme « idéologiquement orienté ».

Dans ce contexte, de nombreuses personnes redoutent que les livres intégrant des personnages LGBTQIA+ ou évoquant des questions de justice sociale ne soient directement visés par cette politique. Ces livres sont d’ailleurs ceux qui ont majoritairement été concernés par les tentatives de censure ces dernières années.

À noter que le simple fait de mettre en scène un personnage homosexuel, transgenre ou issu d’une minorité pourrait être perçu comme une tentative d’endoctrinement selon la grille de lecture de certains groupes conservateurs. Ces inquiétudes sont renforcées par la promesse de Trump de « défendre les valeurs traditionnelles » et de « protéger les enfants de la propagande ».

Le Projet 2025 : un plan de la Heritage Foundation qui inquiète pour la liberté d’expression

Outre les orientations annoncées par le président Trump, un document nommé « Projet 2025 », élaboré par la Heritage Foundation, cristallise les inquiétudes. Ce projet, conçu comme une feuille de route pour une administration conservatrice, propose des réformes radicales, notamment la suppression pure et simple du ministère de l’Éducation. Cette démarche aurait des implications majeures pour les politiques éducatives nationales.

Le projet 2025

Le Projet 2025 s’inscrit dans une logique de « guerre culturelle » visant à purger les programmes scolaires de tout contenu jugé contraire aux « valeurs américaines ». Dans son avant-propos, le président de la Heritage Foundation, Kevin Roberts, dénonce la prétendue « propagande raciste, anti-américaine et ahistorique » qu’il estime omniprésente dans les classes américaines. Le Projet 2025 critique ouvertement la théorie critique de la race et l’idéologie du genre, les qualifiant de « doctrines toxiques » qui « empoisonnent nos enfants ».

Cette prise de position ne fait qu’alimenter la crainte d’une future restriction des contenus disponibles dans les établissements scolaires et les bibliothèques publiques. En l’absence de supervision fédérale, les États seraient libres de définir leurs propres critères, et certains pourraient aller jusqu’à bannir des ouvrages en fonction de critères idéologiques stricts, menaçant ainsi la diversité littéraire et la liberté d’accès à la culture.

Assimilation du contenu LGBTQ+ à de la pornographie : un glissement inquiétant du discours conservateur

Un autre point particulièrement préoccupant du Projet 2025 est l’assimilation explicite du contenu LGBTQ+ à de la pornographie. Selon le document, les ouvrages contenant des personnages ou des thématiques LGBTQ+ pourraient être traités comme du matériel pornographique, exposant les bibliothécaires et les enseignants qui les diffusent à des poursuites pénales. Dans son avant-propos, Kevin Roberts va jusqu’à affirmer que « la pornographie, qui se manifeste aujourd’hui par la propagation de l’idéologie transgenre et la sexualisation des enfants, n’a aucun droit à la protection du Premier amendement ».

Les états américains qui veulent condamner les bibliothécaires

Six États américains (Idaho, Arkansas, Indiana, Missouri, Dakota du Nord et Oklahoma) ont déjà adopté des lois considérant les bibliothécaires comme des délinquants sexuels potentiels s’ils refusent de retirer certains ouvrages jugés inappropriés des rayons. Actuellement, une dizaine d’autres États envisagent des mesures similaires. Cette dynamique législative laisse craindre une généralisation de ces pratiques, avec des conséquences graves pour les professionnels du secteur, accusés de promouvoir des idéologies dangereuses pour la jeunesse.

PEN America, une organisation engagée pour la défense de la liberté d’expression, dénonce les implications de cette législation. En qualifiant des contenus éducatifs et des représentations de minorités sexuelles et de genre de « pornographiques », le Projet 2025 contribue à créer un climat de suspicion et de peur, qui pourrait dissuader de nombreux éducateurs et bibliothécaires d’inclure des livres représentatifs de la diversité contemporaine dans leurs collections.

Une menace pour la diversité littéraire et la liberté d’expression dans les bibliothèques américaines

La mise en œuvre du Projet 2025, si elle venait à voir le jour, pourrait bouleverser le paysage littéraire et éducatif américain, élevant des barrières significatives contre la diversité des points de vue et la représentation des minorités. Des œuvres populaires comme Twilight, Hunger Games, ou La Servante écarlate, qui explorent des questions de liberté, de justice et d’identité, pourraient se retrouver dans le collimateur des législateurs. 

Les livres les plus bannis à un niveau local

Pour information, La servante écarlate de Margaret Atwood fait partie des titres les plus souvent interdits à travers le pays, à un niveau local, aux côtés de Où es-tu Alaska ? de John Green, 13 reasons why de Jay Asher ou bien encore Un palais d’épines et de roses de Sarah J. Maas. 

À l’heure où la littérature est plus que jamais un outil de sensibilisation et d’ouverture à l’autre, ces initiatives conservatrices pourraient bien mettre en péril l’une des valeurs fondatrices de la société américaine : la liberté d’expression.

Sources : PEN america, Washington post, DailyMail, ActuaLitté

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