Avec ses atmosphères feutrées, ses intrigues centrées sur la connaissance et son esthétique sombre, la dark academia s’est imposée comme un genre incontournable dans la fantasy contemporaine. Avec des romans comme Babel de R.F. Kuang ou encore Atlas Six d’Olivie Blake, la fascination pour les sociétés secrètes, la connaissance et les institutions académiques énigmatiques ne cesse de croître. Pourquoi ce genre attire-t-il autant de lecteurs ? Comment est-il devenu un pilier du paysage littéraire actuel ? Et pourquoi les attentes des lecteurs à son sujet sont-elles si élevées ?
La dark academia : entre fascination pour le savoir et esthétique sombre
Né sur Tumblr à la moitié des années 2010 avant d’exploser sur TikTok, le terme dark academia désigne un mouvement culturel et esthétique qui célèbre un univers académique imprégné de mystères. Inspiré par les récits gothiques, la philosophie romantique et les classiques de la littérature, il met en avant une quête de savoir poussée.
Dans la littérature, ce genre se caractérise par des intrigues se déroulant dans des institutions prestigieuses, des personnages souvent tourmentés par leur ambition et des thématiques mêlant élitisme, secret et manipulation.
Avec l’essor de la fantasy, la dark academia s’est peu à peu mélangée avec des éléments surnaturels, donnant naissance à des romans comme Babel de R.F. Kuang ou encore Atlas Six d’Olivie Blake. Aujourd’hui, cette atmosphère est particulièrement recherchée par les amateurs de fantasy.
Un succès qui repose sur un public exigeant et passionné ?
Si la dark academia séduit autant, c’est en grande partie grâce à son lectorat. À la croisée des fans de fantasy, des amateurs de récits gothiques et des passionnés de littérature classique, ce genre attire des lecteurs qui ont des attentes élevées. Ils recherchent des intrigues complexes, des réflexions profondes sur le savoir et des univers où l’intellect a une place centrale.
Cette exigence se traduit aussi dans la réception des livres. Un roman étiqueté dark academia et qui ne remplit pas ses promesses est vite critiqué. Un exemple marquant est Un automne pour te pardonner de Morgane Moncomble, qui, bien que présenté par certains une œuvre de dark academia, a déçu les lecteurs fans du genre en raison de son manque de développement sur l’aspect académique.
Les attentes ne se limitent pas aux thématiques, mais touchent aussi le style. La dark academia étant fortement inspirée de la littérature classique, les lecteurs attendent une écriture élégante et immersive, à l’image de Babel. Une plume trop moderne ou trop simplifiée peut être perçue par certains comme une trahison de l’essence même du genre.
Pourquoi la dark academia est-elle aussi populaire aujourd’hui ?
Plusieurs raisons expliquent la montée en puissance de la dark academia dans le paysage littéraire.
D’abord, la fascination pour les lieux d’apprentissage et les sociétés secrètes n’a rien de nouveau. Récemment, la romance Insomnia de Léa Nemezia – publié aux éditions Hugo sous le label new romance – a fait beaucoup parler en proposant de plonger dans l’univers des sociétés secrètes à Oxford. De façon générale, les récits où la quête du savoir est au cœur de l’intrigue connaissent une popularité significative, montrant à quel point cette thématique captive les lecteurs, et ce depuis longtemps.
Certains avancent également le fait que le genre reflète également un idéal pour les lecteurs. Beaucoup sont en effet passionnés par la connaissance ainsi que la culture. Les univers dark académia permettent alors de vivre des aventures incroyables dans des décors où le savoir a une place primordiale. Pour certains, cela permet aussi de se plonger dans des lieux jugés inaccessibles, comme par exemple de prestigieuses universités anglaises pour ne citer qu’elles.
Enfin, comme dans bien d’autres tendances, l’esthétique joue également un rôle crucial. Les visuels de bibliothèques anciennes, de décorations d’inspiration victorienne et de bougies vacillantes ont largement contribué à l’essor du genre sur les réseaux sociaux, notamment sur Instagram et TikTok. Cette esthétique, qui rappelle les romans gothiques, alimente une nostalgie et un romantisme qui séduisent un large public.
Dark academia, un genre en pleine mutation et qui continue d’évoluer
Comme évoque précédemment, aujourd’hui, la dark academia s’éloigne progressivement de ses origines purement réalistes pour s’ouvrir à des récits plus diversifiés. Le genre s’enrichit avec des voix plus variées, comme en témoigne Babel de R.F. Kuang, qui intègre des réflexions sur le colonialisme et la barrière de la langue, ou encore Indécente Initiation de S.T. Gibson, à paraître bientôt et qui explore l’éveil du désir queer dans une atmosphère académique gothique.
Par ailleurs, on observe un retour vers une dark academia plus proche du fantastique, avec des récits intégrant de la magie ou des éléments surnaturels. L’arrivée de titres comme Katabasis de R.F. Kuang, annoncé comme une dark academia où des étudiants doivent descendre aux Enfers, témoigne de cette évolution vers une fantasy toujours plus sombre et immersive.
Le genre, loin de s’essouffler, semble donc encore en pleine expansion, porté par une communauté de lecteurs investis et par des récits qui explorent toujours plus profondément les tensions entre savoir, pouvoir et ambition.
